Publié le 6 janv. 2023 à 19:23
On pourrait penser que le fossé qui sépare le monde de la gestion d’actifs et les étoiles d’Hollywood est profond. Et pourtant, il a été discrètement franchi par un ancien gérant de BlackRock, Randy Robertson, qui s’est retrouvé sous le feu des projecteurs du gendarme américain des marchés.
La Securities and Exchange Commission (SEC) vient de lui infliger une amende de 250.000 dollars. L’homme âgé de 62 ans a immédiatement accepté de payer, sans admettre ni contester la sentence.
Entre 2015 et 2019, l’ex-gérant du premier groupe de gestion d’actifs mondial avait choisi, pour le fonds BlackRock Multi-Sector Income Trust, d’investir jusqu’à 75 millions de dollars dans des filiales d’Aviron Group LLC, spécialisées dans la distribution de films.
Investissement démesuré
Le gendarme boursier américain souligne que Randy Robertson a joué un « rôle significatif » dans la recommandation de cet investissement, le plus important de ce portefeuille en 2017 avec 10 % du total des actifs. Une participation d’une ampleur tout à fait inhabituelle dans une petite société privée.
Problème : au même moment, Randy Robertson avait demandé à Aviron de promouvoir la carrière de sa fille, actrice. Le groupe avait finalement obtenu pour elle un petit rôle dans un film produit en 2018. Mais le gérant n’avait pas fait part de ces échanges au conseil d’administration d’Aviron, pas plus qu’il n’avait informé les équipes de conformité de BlackRock.
La réalité a fini par éclater rapidement, dans le cadre d’un conflit entre la société de gestion et Aviron. En 2019 BlackRock a réduit à néant ses investissements dans la société cinématographique et a traduit en justice son dirigeant, William Sadleir, pour fraude. Et a enquêté sur le conflit d’intérêts de Randy Robertson.
Villa de Beverley Hills
William Sadleir a été condamné en septembre dernier à 6 ans de prison pour détournement de fonds. Les investissements de BlackRock, supposés soutenir son activité de distribution de films, lui ont surtout permis d’acheter, de rénover et de meubler une luxueuse villa à Beverley Hills. Le gérant avait quant à lui été licencié en février 2020. Selon la SEC , les deux hommes étaient en contact depuis 2014.
« Les professionnels de l’investissement doivent être transparents sur tout conflit d’intérêts avec les sociétés dans lesquels ils investissent les fonds de leurs clients, en incluant les situations qui impliquent des avantages ou une assistance à des membres de leurs familles », a déclaré Andrew Dean, co-directeur de l’unité de gestion d’actifs de la SEC. « Les investisseurs doivent savoir que les conseils qu’ils reçoivent sont libres de tout conflit non avoué, que le conflit soit de nature financière ou non ».