
Publié le 28 nov. 2022 à 21:00
Prise d’envergure pour la France post-Brexit. Le fonds de l’Etat de Singapour Temasek choisit Paris comme nouveau « hub » européen. « Paris sera l’alter ego de Londres. Le pool de talents est profond, déclare Benoît Valentin, le responsable des investissements de Temasek dans la région Europe, Moyen-Orient et Afrique. Depuis le Brexit, les risques d’attrition ont crû outre-Manche ».
Actionnaire depuis plusieurs années en France de Safran (défense), Neoen (énergies renouvelables), Ceva (santé animale), de start-up comme Fairmat et Innovafeed , ou encore en Espagne et en Allemagne de Repsol et Bayer, le fonds de près 300 milliards de dollars veut accélérer ses investissements en Europe. Une région vers laquelle il a déjà multiplié par quatre, en dix ans, ses allocations, à quelque 32 milliards d’euros.
D’une dizaine de professionnels dans la capitale française, l’équipe pourrait doubler d’ici à deux ans. « C’est un signal fort de nos ambitions d’investissement en Europe », souligne Benoît Valentin. Malgré l’environnement macroéconomique plus complexe en Europe, le fonds voit dans le continent ses qualités d’innovation ou de compétitivité, indique le responsable des investissements, qui juge aussi les entrepreneurs plus résilients qu’ailleurs, en raison du surcroît de contraintes réglementaires.
Agenda climatique
La guerre en Ukraine n’est pas de nature à freiner les ambitions de Temasek dans la région. Le fonds, qui a généré 14 % de rendement annuel depuis sa création, en 1974, entend s’inscrire dans la durée. « L’Europe, c’est un quart du PIB mondial et de la capitalisation boursière, et 45 % des 500 plus grosses sociétés familiales. Nous avons un alignement naturel avec ces entreprises par notre empreinte globale et notre ADN long terme », dit Benoît Valentin.
A l’agenda du géant singapourien en Europe figure surtout la priorité donnée aux investissements dans la transition climatique. Une façon de rééquilibrer son portefeuille de participations historiques, qui inclut notamment la compagnie aérienne Singapore Airlines ou l’énergéticien Singapore Power. Et Temasek n’entend ni se reposer sur des rachats de crédits carbone ni procéder à des cessions stratégiques.
« Notre agenda est complètement aligné avec celui de la Commission en matière de transition énergétique et de lutte climatique, ajoute le responsable. Et nous savons que cet engagement est durable. » De facto, sur d’autres zones du globe, comme aux Etats-Unis, les ambitions en la matière dépendent beaucoup de l’agenda politique.
Le signal envoyé par le géant singapourien pourrait convertir d’autres investisseurs parmi les fonds souverains. En premier lieu, selon des sources, son cousin GIC, qui investit les quelque 800 milliards d’euros de réserves de change de l’Etat de Singapour.