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Publié le 20 déc. 2022 à 18:15Mis à jour le 20 déc. 2022 à 18:29
Temps variable à orageux attendu pour les banques ces prochains mois. Dans sa météo des risques financiers qu’elle réalise deux fois par an et a publiée mardi, la Banque de France a relevé le seuil d’alerte sur les questions touchant à la rentabilité du secteur bancaire.
Parmi les sujets d’attention, le « choc de taux » auquel sont soumis les établissements financiers depuis le printemps dernier : un cocktail de remontée brutale des taux voulue par les banques centrales qui luttent contre l’inflation, et de volatilité sur diverses classes d’actifs (matières premières, obligations…) liée à la guerre en Ukraine .
Le rapport évoque ainsi la récente crise de la dette souveraine britannique. En septembre, le Royaume-Uni a vécu une tornade avec la flambée des taux d’intérêt qui a déstabilisé ses fonds de pension. Ce scénario n’est pas envisagé par le superviseur français, mais il illustre à ses yeux l’impact potentiel d’un « choc de taux » sur le système financier.
« Grâce à une structure de bilan solide, les banques sont bien positionnées pour faire face à l’évolution du contexte macroéconomique », estiment les auteurs du rapport. Il n’empêche : ce contexte économique incertain est un virage complexe à négocier pour le secteur.
Les livrets d’épargne en cause
La situation est paradoxale pour les groupes bancaires : à moyen terme, le relèvement des taux devrait agir comme un puissant stimulant pour les revenus du secteur. Mais avant d’en arriver là, il faudra serrer les dents.
« La progression de la marge nette d’intérêts est contenue à ce stade par la progression relativement plus rapide du coût moyen du passif », souligne la Banque de France. Autrement dit, la remontée des taux se fait ressentir plus vite sur la colonne des dépenses (les coûts de refinancement) que sur celle des revenus (le prix auquel un crédit est accordé).
Au rang des accusés, figurent les livrets d’épargne réglementés (Livret A, plan d’épargne logement, etc.) dont la rémunération, fixée par les pouvoir publics, grimpe de façon continue ces derniers trimestres. La hausse des taux a aussi eu des effets négatifs sur les portefeuilles des compagnies d’assurance, ce qui pénalise les fonds propres des banques, qui détiennent toutes une filiale d’assurance.
Davantage de PGE non remboursés
Autre sujet d’attention : l’évolution des crédits impayés, actuellement à un niveau historiquement faible. La hausse des taux ne devrait pas avoir d’effet direct sur la qualité des portefeuilles, car une majorité écrasante des prêts est accordée à taux fixe : toutes choses égales par ailleurs, la capacité de remboursement des emprunteurs n’est ainsi pas altérée. En revanche, la hausse des taux se verra sur les nouveaux prêts et rendra, en cas de pépin, les réaménagements plus difficiles.
Déjà, de premières difficultés économiques peuvent se lire. Les entreprises tirent plus que de coutume sur leurs lignes de trésorerie, et 7,2 % des prêts garantis par l’Etat (PGE) hérités de la crise sanitaire sont désormais « non performants » (impayés depuis plus de 90 jours). « Le poids des PGE dans les prêts non performants des entreprises est passé de 8,4 % à fin 2021 à 9,7 % à fin septembre 2022 », souligne la Banque de France.
Des modèles calibrés pour les taux bas
Des constats largement partagés par les deux principaux superviseurs bancaires au sein de la Banque centrale européenne (BCE), Andrea Enria et Luis de Guindos. Dans une note de blog commune parue mardi, les deux hommes prennent acte de la forte résilience d’ensemble du secteur bancaire face à un choc de taux.
Mais ils estiment que le secteur se montre trop optimiste. « Les modèles utilisés par les banques pour gérer les actifs et les passifs ont souvent été calibrés dans des environnements de taux bas, et ne rendent pas compte des changements dans les préférences et les comportements des consommateurs, qui se produisent généralement lorsque les taux augmentent, comme les retraits de dépôts », estiment les deux hommes.