Musk, Zuckerberg, Bezos, … l’année noire des milliardaires de la tech

Publié le 31 déc. 2022 à 11:03

La Silicon Valley a perdu de son éclat. La capitale mondiale de la tech a été frappée de plein fouet par la chute brutale du secteur à Wall Street. En un an, tout a changé . Le Nasdaq, l’indice américain le plus associé à la tech, a perdu plus de 33 %, l’une des plus mauvaises performances enregistrées par les marchés mondiaux cette année.

Les start-up comme les géants du Net ont dû se serrer la ceinture. Longtemps abreuvé par les milliards de dollars de la tech, San Francisco subit déjà le contrecoup de cette perte de valeur immense. Au troisième trimestre, les prix de l’immobilier ont chuté de plus de 10 % dans la métropole américaine qui accueille les sièges de Twitter, Apple ou encore Google, selon l’Association américaine des agents immobiliers (NAR).

1.400 milliards de dollars effacés

Les milliardaires de la tech, dont la fortune est intimement liée à la bonne santé de Wall Street, n’ont pas été épargnés par cette période de vaches maigres. Une poignée d’entre eux, fondateurs et patrons de mastodontes de la tech, a collectivement perdu plus de 500 milliards de dollars cette année. Soit plus d’un tiers des 1.400 milliards de dollars effacés du patrimoine des 500 personnes les plus riches de la planète en 2022, selon le décompte de Bloomberg.

A lui seul, Elon Musk a perdu plus de 130 milliards de dollars cette année, au fil de ses déboires avec Twitter, de l’annonce de son rachat à a sa reprise en main musclée. Ses prises de position controversées sur le réseau social, sa proximité avec des figures de l’extrême droite et tout simplement le temps démesuré qu’il a consacré à sa dernière acquisition plutôt qu’à Tesla – la clé de voûte de son patrimoine -, ont fait plonger le cours de cette dernière, en dépit du soutien indéfectible des boursicoteurs .

Le constructeur de véhicules électrique a bouclé la pire année de son histoire à Wall Street, en chute de 70 % depuis janvier. Résultat, Elon Musk n’est plus l’homme le plus riche de la planète. En dépit de ces pertes gargantuesques, il reste toutefois en tête du classement aux Etats-Unis avec 138 milliards de dollars. De quoi lui inspirer un tweet ironique : « Comment faire une petite fortune dans les réseaux sociaux ? En démarrant avec une énorme fortune ».

Mark Zuckerberg durement frappé

Les autres grands perdants de la tech américaine sont Jeff Bezos et Mark Zuckerberg. Leurs patrimoines respectifs ont fondu de 85 milliards de dollars et 80 milliards, reflets de la chute de 50 % d’Amazon et de 65 % de Meta (ex-Facebook) en Bourse. Mais tous les grands noms de la tech ont souffert. Larry Page et Sergey Brin, les deux cofondateurs d’Alphabet (ex-Google), ont perdu 45 milliards de dollars chacun.

Le patrimoine de Bill Gates a reculé de 28 milliards et celui de Steve Ballmer, qui lui a succédé un temps à la tête de Microsoft, de 20 milliards. Du côté d’Apple, seule la veuve de Steve Jobs, Lauren Powell Jobs, est assez riche pour figurer au classement. Sa fortune a également chuté de 4 milliards de dollars, mais c’est avant tout lié à la baisse de Disney en Bourse. Elle n’aurait en effet plus aucune action Apple, selon Bloomberg, mais elle détient encore une participation dans le leader mondial du divertissement.

Les fortunes éphémères des cryptos

Le coup est particulièrement rude pour Mark Zuckerberg, relégué à la 25e place mondiale avec un patrimoine de 45 milliards de dollars. Il s’en sort toutefois mieux que Changpeng Zhao, dit « CZ », le fondateur et patron de Binance, la principale plateforme d’échange de cryptos. Son patrimoine s’est effondré, passant de 80 milliards de dollars à 12 milliards dans la foulée du krach des cryptos et de l’implosion de son concurrent FTX .

Le secteur dans son ensemble a dû s’adapter à une nouvelle réalité, des fortunes créées avec l’essor des cryptos se sont défaites en un temps record. Les répercussions se font encore sentir sur le marché des montres de luxe, signe extérieur de richesse prisé par ces nouveaux riches : sur le marché secondaire, leur prix a chuté de plus de 25 % depuis la fin mars, selon le site spécialisé Watchcharts.com.

La revanche de la « vieille économie »

A noter, parmi les plus fortes baisses de l’année, la place particulière de Mackenzie Scott, l’ex-femme de Jeff Bezos. Depuis son divorce en 2020, elle s’est attachée à donner le plus rapidement sa fortune à des oeuvres caritatives. Elle affirme avoir déjà reversé plus de 14 milliards de dollars à des organisations très diverses, allant de la protection de l’enfance à la promotion de la biodiversité, de l’aide au développement économique à la mise en valeur du patrimoine culturel de minorités défavorisées. Entre ses dons et la forte chute d’Amazon en Bourse, sa fortune a été réduite de 37 milliards cette année. Avec un patrimoine réduit à 19 milliards de dollars, elle n’est plus que la 75e personne la plus riche des Etats-Unis.

En dehors de la tech, les patrimoines des plus riches ont bien mieux résisté, en particulier ceux qui se sont construits grâce à la « vieille économie ». L’oracle d’Omaha, Warren Buffett, âgé de 92 ans, est devenu le troisième homme le plus riche des Etats-Unis cette année, après avoir limité ses pertes à moins de 2 milliards de dollars. Son conglomérat, Berkshire Hathaway, très diversifié, a certes souffert de la hausse des taux dans ses activités immobilières, mais cette faiblesse a été plus que compensée par le dynamisme de ses activités dans la logistique et le pétrole. Le retour en force de l’or noir a surtout profité à la famille Koch, l’une des rares grandes fortunes à s’être enrichie au cours de l’année passée. Elle détient de nombreuses sociétés actives dans le raffinage et le transport de produits pétroliers et dans l’exploitation minière.

Gautam Adani, grand gagnant de l’année

Il talonne Elon Musk au classement des hommes les plus riches du monde. L’indien Gautam Adani a réalisé le tour de force de faire croître sa fortune de près de 45 milliards de dollars au cours d’une année marquée par la chute des marchés financiers mondiaux, dépassant au passage des sommités telles que Bill Gates ou Warren Buffett grâce à son patrimoine estimé à 121 milliards de dollars. Il est à la tête d’un conglomérat allant de la logistique à la production d’électricité en passant par la construction. Deux de ses sociétés cotées sont membres de l’indice phare de la Bourse de Mumbai, le NSE Nifty 50, dont sa holding Adani Enterprises, qui a bondi de 124 % depuis le début de l’année. Son groupe a contribué à la belle performance du marché indien cette année, l’un des rares au monde à s’inscrire en hausse (+2,7 % pour le Nifty 50). Reflet du dynamisme de son économie, le marché indien dans son ensemble a doublé Londres et Paris en termes de capitalisation en 2022.